Face à la confusion de certain·e·s de nos camarades en France sur la lutte du peuple catalan pour son autodétermination dans un moment où les libéraux du pays poussent par des intérêts capitalistes à une « démocratie républicaine », face aussi à la propagande médiatique bourgeoise qui essaye de dire que des groupes radicaux d’anarchistes poussent à l’extrême violence ce mouvement de contestation et qu’ils participent activement, il faut rappeler la position des groupes libertaires, qu’ils soient dans les syndicats ou pas.
Face à
la confusion de certain·e·s de nos camarades en France sur la lutte du
peuple catalan pour son autodétermination dans un moment où les libéraux
du pays poussent par des intérêts capitalistes à une « démocratie républicaine »,
face aussi à la propagande médiatique bourgeoise qui essaye de dire que
des groupes radicaux d’anarchistes poussent à l’extrême violence ce
mouvement de contestation et qu’ils participent activement, il faut
rappeler la position des groupes libertaires, qu’ils soient dans les
syndicats ou pas.
La CGT et la CNT,
les deux syndicats anarchistes, ont réagi depuis bien longtemps et ont
même signé des textes ensemble pour ce positionner contre le
nationalisme qui détruit tout leur travail de lutte des classes dans les
quartiers et dans les lieux de travail pour de meilleures conditions de
vie en Catalogne et en faveur des travailleurs et travailleuses
immigré·e·s. Si les anarchistes participent de ce mouvement, les raisons
sont autres (anticarcérale, contre la répression policière et contre
l’État – qu’il soit espagnol ou catalan). Ci-dessous, nous pouvons lire
le dernier communiqué de la CNT de Barcelone publié le 18 octobre 2019 dans le journal Solidarid Obrera.
Confédération nationale du travail Barcelona face aux derniers événements
La décision du procès qui a entraîné des peines de prison
disproportionnées pour douze personnalités de la vie politique catalane
pour différents crimes représente un net recul des libertés, car elle
génère une jurisprudence qui finira par être utilisée contre la
contestation sociale sous toutes ses formes. Par conséquent, nous
comprenons la réponse sociale dans les rues.
À la CNT Barcelone, nous voulons faire
connaître notre position sur les événements répressifs qui ont suivi :
des dizaines de blessés, un jeune homme qui a perdu un œil, un autre qui
a perdu un testicule, etc. Face à un tel spectacle, la seule chose que
nous puissions faire est de nous positionner contre la répression : la CNT ne sera jamais du côté du bourreau.
Ceci dit, nous souhaitons également déclarer qu’en tant
qu’organisation de classe, nous sommes à la fois contre le projet
relatif à l’État espagnol autant qu’à l’État catalan. Étant donné que
chaque État, dans l’exercice du monopole de la violence et en tant
qu’instrument de l’oligarchie, vise à contrôler et à extraire la
richesse générée par la classe ouvrière au profit de quelques-uns. À
cette occasion, la bourgeoisie catalane a elle-même été victime des
réseaux répressifs d’une démocratie libérale, à laquelle elle est
indispensable depuis des décennies. Nous ne pouvons pas oublier la
torture dans les prisons catalanes, la corruption systématique et la
répression à l’égard de notre organisation et de nombreux autres groupes
et personnes qui en ont été victimes. Dans un exercice évident
d’hypocrisie et de cynisme, nous avons été témoins de la façon dont le
président Quim Torra a encouragé le peuple à manifester et à le réprimer
ensuite avec la police. Le ministre des Affaires étrangères, Miquel
Buch, a défendu les actions des Mossos, condamnant la « violence des manifestants ». Oriol Junqueras continue d’insister pour que le conflit soit résolu aux urnes, bien sûr.
Nous nous tournons vers la classe ouvrière de Catalogne qui est
descendue dans la rue pour lui exprimer avec conviction que ce ne seront
ni les dirigeants politiques, ni ceux des drapeaux rances et
ensanglantés, ni ceux des enseignements nouveaux et prometteurs qui nous
mèneront vers une société plus sociale, juste et libre. Ils ne le
seront pas parce qu’ils ne l’ont jamais voulu, parce qu’ils ont toujours
défendu en fin de compte des intérêts très spécifiques, les leurs.
C’est pourquoi ils n’ont pas hésité, et n’hésiteront pas, à utiliser les
gens pour se protéger, en utilisant les illusions et les sentiments de
la population, en canalisant la culture, la langue et les faits
différenciateurs vers la polarisation et le nationalisme. Un
nationalisme qui, comme tous les autres, est abstrait ne définit rien
au-delà de ce que chacun construit dans son esprit sur l’avenir qui « offre ».
Nous souhaitons également exposer notre désaccord total concernant le
comportement des syndicats de l’indépendance, qui soutiennent le projet
nationaliste de grèves politiques ces dernières années, en vidant de
sens un outil de lutte des travailleurs. La grève est un outil de la
classe ouvrière pour s’opposer au capital, pas pour couvrir des projets
patriotiques.
Nous voulons nous débarrasser des partis politiques, de ces organisations « syndicales »,
du nationalisme. Notre seule lutte est celle qui représente nos
intérêts en tant que classe ouvrière : la lutte des classes. C’est le
seul moyen. En ce sens, nos aspirations sont claires :
- Nous nous opposons à la dernière réforme du
travail (2012), qui a réduit et facilité le licenciement, généralisant
le licenciement objectif, donnant à l’ETT le
rang d’agences de placement, facilitant la reprise des accords et,
finalement, rendant nos conditions de travail encore plus précaires.
-
Contre la soi-disant loi Gag (2015) qui était une réponse aux
mobilisations sociales, qui vise à réduire au silence des sanctions —
avec des amendes allant jusqu’à 600 000 euros —, à la poursuite de
réunions, rassemblements, manifestations…
-
Toutes ces lois et beaucoup d’autres obéissent à une stratégie
répressive et néolibérale à l’encontre de la classe ouvrière à laquelle
le gouvernement catalan a également participé. Nous nous opposons
également à des lois catalanes telles que Llei Aragonès, perpétrées par
le vice-président du gouvernement actuel, Pere Aragonès, qui menace de
privatiser et de marchandiser encore plus de services de base tels que
l’éducation, la santé ou les services sociaux.
C’est notre prochain horizon, et les premières bases d’un véritable
changement social, au-delà de la fumée qu’ils nous vendent depuis deux
ans avec les déclarations du cirque électoral dans lequel nous évoluons.
De la CNT, nous parions que la classe
ouvrière est organisée sur le lieu de travail, dans les quartiers, à
travers des organisations horizontales. Une stratégie cohérente est
également nécessaire, qui peut commencer avec la formation de sections
syndicales sur le lieu de travail pour améliorer les conditions de
travail, les associations de quartier dans les quartiers pour lutter
contre la spéculation urbaine, etc.
Certes, cette année marque le 100e
anniversaire de la fameuse grève de la Canadiense, la grande grève grâce
à laquelle la journée de huit heures a été réalisée, et qui est
maintenant utilisée par des secteurs indépendants pour montrer à quel
point le peuple catalan a toujours été combatif. Mais ce n’est pas le
peuple catalan, mais la classe ouvrière — également immigrante d’autres
parties de la péninsule — apatride et internationaliste pour la plupart,
qui a joué le rôle principal dans ce grand exploit. Nous sommes
profondément choqués de voir la manière dont la lutte de nos copains et
nos copines est en train d’être utilisée. Sans doute, qu’ils et elles
ont du faire face à la tentative par certains de donner à leur lutte un
caractère « identitaire ».
Ils et elles n’avaient pas de doutes, ils et elles savaient appartenir à
la classe ouvrière, car ils et elles étaient organisés à la CNT.
Pour lire l’original en catalan et en espagnol :
https://lasoli.cnt.cat/2019/10/18/opinio-cnt-barcelona-davant-els-ultims-esdeveniments-repressius/
La CGT et la CNT,
les deux syndicats anarchistes, ont réagi depuis bien longtemps et ont
même signé des textes ensemble pour ce positionner contre le
nationalisme qui détruit tout leur travail de lutte des classes dans les
quartiers et dans les lieux de travail pour de meilleures conditions de
vie en Catalogne et en faveur des travailleurs et travailleuses
immigré·e·s. Si les anarchistes participent de ce mouvement, les raisons
sont autres (anticarcérale, contre la répression policière et contre
l’État – qu’il soit espagnol ou catalan). Ci-dessous, nous pouvons lire
le dernier communiqué de la CNT de Barcelone publié le 18 octobre 2019 dans le journal Solidarid Obrera.
Confédération nationale du travail Barcelona face aux derniers événements
La décision du procès qui a entraîné des peines de prison
disproportionnées pour douze personnalités de la vie politique catalane
pour différents crimes représente un net recul des libertés, car elle
génère une jurisprudence qui finira par être utilisée contre la
contestation sociale sous toutes ses formes. Par conséquent, nous
comprenons la réponse sociale dans les rues.
À la CNT Barcelone, nous voulons faire
connaître notre position sur les événements répressifs qui ont suivi :
des dizaines de blessés, un jeune homme qui a perdu un œil, un autre qui
a perdu un testicule, etc. Face à un tel spectacle, la seule chose que
nous puissions faire est de nous positionner contre la répression : la CNT ne sera jamais du côté du bourreau.
Ceci dit, nous souhaitons également déclarer qu’en tant
qu’organisation de classe, nous sommes à la fois contre le projet
relatif à l’État espagnol autant qu’à l’État catalan. Étant donné que
chaque État, dans l’exercice du monopole de la violence et en tant
qu’instrument de l’oligarchie, vise à contrôler et à extraire la
richesse générée par la classe ouvrière au profit de quelques-uns. À
cette occasion, la bourgeoisie catalane a elle-même été victime des
réseaux répressifs d’une démocratie libérale, à laquelle elle est
indispensable depuis des décennies. Nous ne pouvons pas oublier la
torture dans les prisons catalanes, la corruption systématique et la
répression à l’égard de notre organisation et de nombreux autres groupes
et personnes qui en ont été victimes. Dans un exercice évident
d’hypocrisie et de cynisme, nous avons été témoins de la façon dont le
président Quim Torra a encouragé le peuple à manifester et à le réprimer
ensuite avec la police. Le ministre des Affaires étrangères, Miquel
Buch, a défendu les actions des Mossos, condamnant la « violence des manifestants ». Oriol Junqueras continue d’insister pour que le conflit soit résolu aux urnes, bien sûr.
Nous nous tournons vers la classe ouvrière de Catalogne qui est
descendue dans la rue pour lui exprimer avec conviction que ce ne seront
ni les dirigeants politiques, ni ceux des drapeaux rances et
ensanglantés, ni ceux des enseignements nouveaux et prometteurs qui nous
mèneront vers une société plus sociale, juste et libre. Ils ne le
seront pas parce qu’ils ne l’ont jamais voulu, parce qu’ils ont toujours
défendu en fin de compte des intérêts très spécifiques, les leurs.
C’est pourquoi ils n’ont pas hésité, et n’hésiteront pas, à utiliser les
gens pour se protéger, en utilisant les illusions et les sentiments de
la population, en canalisant la culture, la langue et les faits
différenciateurs vers la polarisation et le nationalisme. Un
nationalisme qui, comme tous les autres, est abstrait ne définit rien
au-delà de ce que chacun construit dans son esprit sur l’avenir qui « offre ».
Nous souhaitons également exposer notre désaccord total concernant le
comportement des syndicats de l’indépendance, qui soutiennent le projet
nationaliste de grèves politiques ces dernières années, en vidant de
sens un outil de lutte des travailleurs. La grève est un outil de la
classe ouvrière pour s’opposer au capital, pas pour couvrir des projets
patriotiques.
Nous voulons nous débarrasser des partis politiques, de ces organisations « syndicales »,
du nationalisme. Notre seule lutte est celle qui représente nos
intérêts en tant que classe ouvrière : la lutte des classes. C’est le
seul moyen. En ce sens, nos aspirations sont claires :
- Nous nous opposons à la dernière réforme du
travail (2012), qui a réduit et facilité le licenciement, généralisant
le licenciement objectif, donnant à l’ETT le
rang d’agences de placement, facilitant la reprise des accords et,
finalement, rendant nos conditions de travail encore plus précaires.
-
Contre la soi-disant loi Gag (2015) qui était une réponse aux
mobilisations sociales, qui vise à réduire au silence des sanctions —
avec des amendes allant jusqu’à 600 000 euros —, à la poursuite de
réunions, rassemblements, manifestations…
-
Toutes ces lois et beaucoup d’autres obéissent à une stratégie
répressive et néolibérale à l’encontre de la classe ouvrière à laquelle
le gouvernement catalan a également participé. Nous nous opposons
également à des lois catalanes telles que Llei Aragonès, perpétrées par
le vice-président du gouvernement actuel, Pere Aragonès, qui menace de
privatiser et de marchandiser encore plus de services de base tels que
l’éducation, la santé ou les services sociaux.
C’est notre prochain horizon, et les premières bases d’un véritable changement social, au-delà de la fumée qu’ils nous vendent depuis deux ans avec les déclarations du cirque électoral dans lequel nous évoluons. De la CNT, nous parions que la classe ouvrière est organisée sur le lieu de travail, dans les quartiers, à travers des organisations horizontales. Une stratégie cohérente est également nécessaire, qui peut commencer avec la formation de sections syndicales sur le lieu de travail pour améliorer les conditions de travail, les associations de quartier dans les quartiers pour lutter contre la spéculation urbaine, etc.Certes, cette année marque le 100e anniversaire de la fameuse grève de la Canadiense, la grande grève grâce à laquelle la journée de huit heures a été réalisée, et qui est maintenant utilisée par des secteurs indépendants pour montrer à quel point le peuple catalan a toujours été combatif. Mais ce n’est pas le peuple catalan, mais la classe ouvrière — également immigrante d’autres parties de la péninsule — apatride et internationaliste pour la plupart, qui a joué le rôle principal dans ce grand exploit. Nous sommes profondément choqués de voir la manière dont la lutte de nos copains et nos copines est en train d’être utilisée. Sans doute, qu’ils et elles ont du faire face à la tentative par certains de donner à leur lutte un caractère « identitaire ». Ils et elles n’avaient pas de doutes, ils et elles savaient appartenir à la classe ouvrière, car ils et elles étaient organisés à la CNT.
Pour lire l’original en catalan et en espagnol :
https://lasoli.cnt.cat/2019/10/18/opinio-cnt-barcelona-davant-els-ultims-esdeveniments-repressius/